"La Marseillaise" : reprise de Gainsbourg en reggae
En 1979, Serge Gainsbourg n'a pas encore atteint le sommet de sa gloire. Ses œuvres qu'il considère comme les plus profondes et les plus travaillées ne rencontrent pas le succès qu'il espère. L'artiste est notamment contrarié par l'engouement du public pour son morceau "Sea, Sex and Sun", qu'il estime pourtant avoir bâclé. Il change alors de cap et part enregistrer un album en Jamaïque. Cet album de reggae intitulé "Aux armes et cætera" sera le premier disque d'or de sa carrière. Serge Gainsbourg s'entoure de la crème des musiciens jamaïcains, notamment Sly and Robbie ainsi que des choristes du célèbre rasta Bob Marley. L'album est enregistré à Kingston et contient notamment un morceau phare, "La Marseillaise" reprise en version reggae. Ce titre porte le même nom que l'album. Gainsbourg reprend donc les paroles de l'hymne national en "talk over" (style parlé et non chanté) sur une instrumentale reggae, accompagné par ses choristes. La chanson titre de l'album sort en avril 1979 et se classe très vite en tête du hit-parade. Plus de 80 000 singles seront vendus la même année et le titre devient un succès national.
"Aux armes et cætera" : un titre qui ne plaît pas
La Marseillaise adaptée en version reggae n'est, à l'époque, pas du goût de tout le monde. Certains conservateurs s'en offusquent et y voient là une véritable provocation de la part de l'artiste qu'ils accusent de non-patriotisme. La polémique est lancée par Michel Droit, journaliste au Figaro, qui publie en juin 1979 un article acerbe au sujet des choix artistiques de Serge Gainsbourg. Les discussions autour du morceau prennent de l'ampleur et contribuent à rendre la chanson encore plus populaire auprès du public français. Les ventes de l'album décollent et il devient rapidement disque de platine.
"Aux armes et cætera" : les tensions s'apaisent
Les opposants de Serge Gainsbourg continuent de lui faire barrage et le chanteur est contraint d'annuler une séance de dédicace à Marseille en septembre 1979 sous la pression d'associations militaires. En janvier suivant, une alerte à la bombe l'oblige une nouvelle fois à annuler son concert à Strasbourg. Seul sur scène face au public, il déclare alors avoir "redonné à La Marseillaise son sens initial". Ce qu'il ne sait pas à ce moment-là, c'est que tout le premier rang de la salle est occupé par des militaires parachutistes venus protester contre sa version de "La Marseillaise". Avant de quitter la scène, le chanteur entonne les deux premiers couplets de l'hymne a cappella, les militaires se sentant alors obligés de se mettre au garde-à-vous. Cet événement mettra fin aux attaques concernant Serge Gainsbourg au sujet de ce morceau. En 1981, Gainsbourg achètera le manuscrit original de "La Marseillaise" à une vente aux enchères, en guise de réponse aux personnes l'accusant de non-patriotisme. Il découvrira alors avec malice que Rouget de L'Isle avait lui-même écrit, à partir du deuxième refrain : "Aux armes citoyens ! Etc.".