Serge Gainsbourg : zoom sur sa carrière cinématographique

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Serge Gainsbourg était un artiste complet. Il était chanteur, compositeur, mais pas seulement : c'était aussi un peintre, un acteur et un réalisateur de cinéma. Retour sur sa carrière cinématographique.

Serge Gainsbourg, artiste à multiples facettes

Serge Gainsbourg, né Lucien Ginsburg, baigne depuis tout petit dans les arts en général et dans la musique en particulier. Avec un père pianiste de music-hall, c’est tout naturellement qu’il apprend, tout jeune, à jouer de plusieurs instruments. Même s’il se destine à une carrière de peintre après des études aux Beaux-Arts, force est de reconnaître que la peinture ne nourrit pas son homme. Il débute alors comme musicien dans les piano-bars, les clubs, les cabarets et casinos. Irrévérencieux et volontairement provocateur, Serge Gainsbourg détonne dans le paysage musical. Il connaît son premier succès avec "Le poinçonneur des Lilas" en 1968, puis il récidive deux ans plus tard avec "L’eau à la bouche", chanson du film éponyme. Son physique particulier, celui de "L’homme à la tête de chou", le dessert pour aller au-devant de la scène. Alors, il compose et il écrit pour d’autres. Des chanteuses illustres comme Juliette Gréco, Petula Clark, Brigitte Bardot, Françoise Hardy ou France Gall, prix de l'Eurovision avec "Poupée de cire". La décennie 1970 est fructueuse avec quatre albums majeurs dont "Histoire de Melody Nelson", "Vu de l’extérieur", "Rock Around the Bunker" et "L’homme à la tête de chou". Puis ce sera la période Gainsbarre et les succès entrés dans la légende comme "Élisa", "Mon légionnaire", "Lemon Incest", "La Javanaise", "Je t’aime… moi non plus", "Je suis venu te dire que je m’en vais", ou encore "Sorry Angel", pour ne citer que ces titres.

Mais Serge Gainsbourg n’était pas qu’un illustre chanteur-compositeur-interprète. Il avait plusieurs cordes à son arc, et a fait en parallèle de la chanson une carrière dans le cinéma, tantôt en tant qu’acteur, tantôt en tant que réalisateur, ou enfin, en tant que compositeur de musique de film. Nostalgie vous propose de revenir sur la carrière de Gainsbourg au cinéma, pan moins connu de son existence.

Serge Gainsbourg acteur

Serge Gainsbourg a joué aussi bien pour le cinéma que pour la télévision.

Au cinéma, on le retrouve notamment en 1968 dans "Le pacha" de Georges Lautner, avec des dialogues de Michel Audiard et Jean Gabin dans la distribution. Il joue aussi dans "Slogan", réalisé par Pierre Grimblat en 1969, un film dans lequel Serge Gainsbourg interprète le rôle d’un publicitaire couronné par un prix italien et qui, à l’occasion de cette remise de prix à Venise, croise une jeune Anglaise dont il tombe éperdument amoureux. Et cette jeune Anglaise n’est autre que… Jane Birkin, dont il va tomber amoureux dans la vie aussi. En 1988, il incarne son propre rôle dans le film d’Agnès Varda, "Jane B. par Agnès V.". Serge Gainsbourg participera ainsi à plus de trente films pour le cinéma en tant qu’acteur, entre 1959 et 1992.

La télévision n’est pas en reste. Il joue dans un épisode du feuilleton "Les cinq dernières minutes" en 1965, dans la série "Vidocq" en 1967, ou encore dans "Bons baisers de Tarzan" en 1974. On lui dénombre un peu plus de quinze participations en tant qu’acteur de téléfilms entre 1962 et 1974.

Serge Gainsbourg réalisateur

Serge Gainsbourg a réalisé cinq films pour le cinéma. Décalés et provocateurs, à son image, ils n'ont pas toujours été bien accueillis par le public.

- "Je t'aime moi non plus" en 1976

En 1969, Serge Gainsbourg croise le chemin de Jane Birkin, jeune Anglaise de presque vingt ans sa cadette, sur le tournage du film "Slogan". C’est elle qu’il choisit pour le premier rôle féminin pour son premier film en tant que réalisateur. Serveuse dans un bar, elle s’éprend d’un conducteur de camion joué par Joe Dallesandro. Mais ce dernier est homosexuel. Une histoire d’amour sur fond de jalousie. Ce film reçoit un bon accueil. Quant à la chanson "Je t’aime moi non plus" qui accompagne le film, elle reçoit le César de la meilleure musique écrite pour un film en 1977.

- "Le physique et le figuré" (court métrage) en 1981

C’est à un court métrage de cinq minutes pour une marque de produits de beauté que Serge Gainsbourg s'attelle en 1981. Une salle de bains au décor noir et blanc, avec un sol jonché de bouteilles de cristal. Dans ce décor luxueux avec un lustre magnifique et du marbre partout, une mannequin suédoise sort de son bain de mousse pour s’asseoir au milieu des flacons. Un scénario simple et épuré dans un cadre chargé, le tout avec un zeste de provocation.

- "Équateur" en 1983

Pour la réalisation de ce film, Serge Gainsbourg s’inspire du livre de Georges Simenon, "Le coup de lune". Un homme désireux de faire fortune en Afrique s’éprend d'une jeune femme tenancière d’un hôtel au Gabon, mais cette femme est l’auteure d’un meurtre. Dans ce film joue notamment Francis Huster. L’accueil tant du public que de la critique est glacial.

- "Charlotte for Ever" en 1986

Le film "Charlotte for Ever" fait scandale à sa sortie. Provocateur, Serge Gainsbourg y joue le rôle du père alcoolique de Charlotte (incarnée par sa propre fille, Charlotte Gainsbourg), adolescente de 15 ans, avec laquelle il entretient des rapports incestueux. Difficile pour le public de ne pas confondre réalité et fiction.

- "Stan the Flasher" en 1990

C’est dans le film réalisé par Serge Gainsbourg "Stan the Flasher" que l’actrice Élodie Bouchez fait ses débuts. Elle a pour partenaire Claude Berri, alias Stan, qui interprète un ancien prof d’anglais pervers et exhibitionniste envers les jeunes femmes auxquelles il donne des cours particuliers. Ce film heurte les esprits de l’époque.

Serge Gainsbourg compositeur pour le cinéma

Serge Gainsbourg a largement fait bénéficier le cinéma de ses talents de compositeur. Du film "Les loups dans la bergerie" (en 1959) au film "Tenue de soirée" (en 1986), il a composé plus de vingt musiques de films.

Sa première participation en tant que compositeur de musique de film remonte à 1959 avec le long métrage réalisé par Hervé Bromberger sur deux voyous en cavale : "Les loups dans la bergerie". Sortie la même année, la bande originale de "L’eau à la bouche" porte aussi la signature de Serge Gainsbourg, et connaît un succès relatif avec 100 000 disques vendus. Parmi les plus grands succès de musiques de films composées par Serge Gainsbourg, on retient forcément "Elisa" pour le film "L’horizon" de Jacques Rouffio (chanson qui sera utilisée à nouveau trente ans plus tard pour le film "Elisa" de Jacques Becker), mais aussi "Requiem pour un con" pour le film franco-italien "Le pacha" de Georges Lautner (en 1968) : cette chanson est alors interdite de diffusion sur les ondes radiophoniques, car elle est jugée trop vulgaire. A contrario, elle a été abondamment diffusée à la mort de Serge Gainsbourg, dans sa version remixée, en guise d’hommage. Inoubliable aussi, la bande-annonce officielle du film "Les bronzés" de Patrice Leconte, en 1978 : "Sea, Sex and Sun". Si en 1978, les talents d’auteur-compositeur de Serge Gainsbourg sont notoires, ce dernier est encore peu connu en tant que chanteur. "Sea, Sex and Sun" est son premier succès en tant que chanteur, avec plus de 400 000 disques écoulés. On se souvient tous aussi de "Dieu est un fumeur de havanes", chanson du film "Je vous aime" de Claude Berri en 1980, une chanson que Serge Gainsbourg interprète en duo avec l’actrice qui a le premier rôle dans ce film : Catherine Deneuve. Ce titre plébiscité par le public évoque l’addiction de Serge Gainsbourg au tabac. La chanson se classe huitième meilleure vente de 45 tours, et reste ainsi classée un mois et demi. Elle a été reprise douze ans plus tard par un autre duo célèbre, Stone et Charden, sur leur album "Made in France". Autre bande originale entrée dans la légende : celle du film "Charlotte for Ever", un film réalisé par Serge Gainsbourg lui-même en 1986, dans lequel il joue avec sa fille Charlotte Gainsbourg. C’est Charlotte Gainsbourg, alors âgée de 15 ans, qui interprète la chanson "Charlotte for Ever", écrite et composée par son père.