Zénith 1988 : retour sur le dernier grand concert de Serge Gainsbourg

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Décédé en mars 1991, Serge Gainsbourg offre trois ans plus tôt à son public l’un de ses concerts les plus mythiques. Retour sur le passage inoubliable de l’artiste au Zénith de Paris en 1988.

Une dernière tournée pour ses 60 ans

Un an après avoir sorti son 17e et dernier album studio "You're Under Arrest" en 1987, Serge Gainsbourg s’offre pour son 60e anniversaire une tournée française d’une trentaine de dates, qui doit démarrer par sept soirs au Zénith de Paris. Le retour sur scène de l’Homme à la tête de chou est annoncé par une double page de réclame dans la presse avec le sous-titre "Achetez-le 140 balles, revendez-le 500 !", en référence à l’une des plus grandes provocations de Serge Gainsbourg à la télévision. Le ton est également donné par le décor post-apocalyptique installé dans cette salle emblématique de la capitale, et par l’arrivée sur scène d’un Serge Gainsbourg tout en jeans et portant des lunettes noires. "J'ai soixante balais le 2 avril prochain... Ça va, les p'tits gars ? Vous pourriez être mes gamins...", dit-il à un public qui, il est vrai, est très majoritairement composé de jeunes.

Un Zénith à guichets fermés, des dates ajoutées

Cette jeunesse voit en Serge Gainsbourg un modèle, l’un des derniers artistes français rebelles capables à la fois de parler cru ou de s’exprimer comme un poète. Accompagné des musiciens de Billy Rush qui travaille à ses côtés depuis 1984 et l’album "Love on the Beat", Serge Gainsbourg interprète à la fois plusieurs chansons de ses deux derniers albums aux paroles très explicites ("Five easy pisseuses", "Harley David Son of A Bitch", etc.), et certains de ses plus grands succès. En plus de "Couleur café", "La Javanaise", "Bonnie And Clyde" et "Aux armes et cætera", il reprend également "Les Dessous chics" qu'il a écrite pour Jane Birkin et "Mon Légionnaire", grand classique du répertoire d’Édith Piaf. Le public est tellement conquis que les organisateurs ajoutent cinq dates au Zénith. En avril 1988, Serge Gainsbourg se produira aussi au Printemps de Bourges, faisant Stadium plein au contraire d’autres artistes de renom.

Des derniers moments très émouvants sur scène

Il faut dire que Serge Gainsbourg ne triche pas, malgré une certaine fatigue physique et mentale. À fleur de peau à cette période de sa vie, souvent dépressif, Serge Gainsbourg offre à son auditoire de grands moments d’émotion. Il fait notamment monter sur scène son fils Lulu Gainsbourg, âgé de 2 ans, et lui chante l’inédit "Hey Man" dans laquelle il évoque sa mort prochaine qu’il sent venir ("Ouais lorsque j’aurai disparu / Plante pour moi quelques orties / Sur ma tombe, mon petit Lulu"). Emmenant son fils à l’école tous les matins à cette époque, Serge Gainsbourg a repris un rythme de vie plus sain, notamment en termes d’horaires, ce qui lui permet d’offrir une prestation vocale à la hauteur en mettant ses dernières forces sur scène. La série de concerts au Zénith donne d’ailleurs lieu à un album live et à un enregistrement vidéo qui rencontreront un beau succès et offriront un magnifique testament scénique de l'artiste. Après un dernier concert français le 4 mai à Toulouse, Serge Gainsbourg s’envolera pour quelques dates au Japon. Le pays du Soleil-Levant a été le témoin de ses toutes dernières scènes.