Un quatrième pouvoir innovant
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la presse hexagonale assiste à la naissance d’une véritable « culture jeune ». Plus seulement adolescents, ils deviennent des collégiens puis des lycéens, et à travers disques et transistors, la génération du baby boom de l’après-guerre devient aussi une consommatrice à part entière.
Les adolescents ont déjà leurs émissions des programmes de divertissements de « Salut les Copains » et « Age tendre et tête de bois », à « Dim Dam Dom », où se succèdent actrices et chanteuses en vogue telles qu’Anna Karina ou encore Agnès Varda.
Les organes de presses se multiplient, et autant les formats que les contenus se diversifient. La presse individualise sa relation avec le lecteur, et style et contenu s’adaptent dorénavant à une cible sélectionnée.
C’est ainsi qu’émerge à partir des années 1940 de nombreuses revues spécialisées, innovant par leur physionomie et souvent leur liberté de ton.
Mademoiselle Age Tendre : « pour les filles dans le vent »
C’est en octobre 1964 que « Mademoiselle âge tendre » inonde les kiosques à journaux. Au prix de deux francs, les adolescentes se jettent sur ce magazine pour les filles, alliant « idoles » et société.
Concurrencé par « Salut les copains", « MAT » se concentre moins sur la musique que sur la vie adolescente, avec tous les mois le fameux courrier des lecteurs et un horoscope détaillé.
Sont tout de même présentent les chansons chouchous de « Mademoiselle âge tendre » !
Sous l’œil du producteur de l’émission télé éminemment yé-yé, « âge tendre et tête de bois », Albert Raisner, « Mademoiselle âge tendre » devient rapidement le pendant féminin de « Salut les copains ».
Avec en guise de sous titre « pour les filles dans le vent », le magazine propose les tendances dernier cri, et les rubriques beauté où leurs vedettes préférées les conseillent. Audacieux pour l’époque, un feuillet détachable sur la sexualité s’installe même à partir de 1970.
Les recettes des cuisines sont également présentées par des vedettes de la chanson ou du cinéma et y compris par des hommes, démarche novatrice pour l’époque.
Et signe des temps, de nombreux conseils couture, tricot ou décoration sont dévoilés pour être la parfaite femme aux foyers.
« Salut les copains » dans les kiosques
C’est en 1962, année Johnny, que « Salut les copains » intègre les kiosques.
"Salut les copains", c’est dans les années 1960 une émission de télévision et radiophonique avec près de 1 600 000 auditeurs, chaque jour branché sur Europe 1.
Un succès qui se prolonge avec la version papier lancé en juin 1962. En une, « l’idole des jeunes » Johnny Hallyday et le débat passionné « Pour ou contre Vince Taylor ?’.
Les cent milles exemplaires du premier tirage s’épuisent en quelques jours et plus d’un million d’exemplaires sont vendus à la fin du mois.
Aux commandes de cette version papier, toujours Daniel Filipacchi et Franck Ténot, et à la rédaction, Eric Vincent, Guy Abitan ou encore Michel Taittinger.
Plus yé-yé que rock, "SLC" offre une formule où la couleur règne. Rouge, bleu, vert, les Une de « Salut les copains » attirent l’œil.
A l'instar de la radio, le magazine met à l'honneur la variété française et plus rarement anglo-saxonne avec les Beatles ou les Rolling Stones.
Les « idoles » sont suivies chez elle, et racontent anecdotes et confidences sur leurs vies privées. En 1963, le couple phare des yéyés, Johnny Hallyday et Sylvie Vartan pose sur la plage. “Notre meilleure joie, c'est de passer tous les deux au même programme”, confie Johnny à l'intérieur.
Certaines rubriques deviennent incontournables, et notamment celle du courrier des lecteurs, où chacun peut demander un conseil à l’oncle Dan, qui n’est autre que Daniel Filipachi.
Entre chaque numéro, les adolescentes hypothèsent sur qui fera la couverture du prochain magazine, et attendent impatiemment le poster géant de l’artiste en Une à l’intérieur.
Car "Salut les copains" a également ses têtes et ses idoles phares, notamment Sylvie Vartan, un temps compagne de Fillipacchi ou Françoise Hardy, devenue celle de Jean-Marie Périer.
« Nous les garçons et les filles »… et la politique
D’autres magazines se veulent plus politique, avec en tête de liste « Nous les garçons et les filles »..
Reprenant la physionomie de "Salut les copains", le magazine qui paraît à partir de 1963, est en fait rattaché au « Mouvement de la jeunesse communiste » qui souhaite renouveler son image.
Avec en couverture du premier numéro Jean Paul Belmondo, c’est un succès pour le PCF puisque près de 100 000 exemplaires sont vendus tous les mois.
Les adolescents y trouvent ainsi les idoles de l’époque, les dernières tendances, et des conseils beauté.
Un véritable reflet de cette « culture jeune » mais le tout orchestré par le directeur de la rédaction, Paul Merciera, toujours homme d’appareil.
"Nous les garçons et les filles" tranche également avec les autres magazines de jeunesse par son vocabulaire.
Le 22 juin 1963 alors le Tour de France se conclut par des vitres brisées, le magazine titre « Le traquenard de la nation », accusant les organisateurs d’avoir provoqué les incidents par leurs incompétences.
Pilote, aux commandes de la BD
Chaque jeudi, Pilote fait la transition entre la bande dessinée des cours de récré et celle plus adulte des années 1970.
Avec pour slogan : « Mâtin, quel journal ! », le journal accueille au milieu des années 1960 les plus grands artistes de Fred et son Philémon, à Cabu et son Grand Duduche, à côté des classiques que sont Uderzo, le créateur d’Astérix, et Morris, créateur de Lucky Luke.
Cet hebdomadaire français de bande dessinée est fondé en 1959 par les dessinateurs René Goscinny, Albert Uderzo et Jean-Michel Charlier. Édité par Dargaud, la bande dessinée ne se destine dorénavant plus à un public adolescent mais popularise le genre auprès d’une plus large audience.
Pour René Goscinny, Pilote « ne s’adresse pas seulement aux enfants, ni même aux adolescents mais aussi aux adultes. Après tout il n’y a pas d’âge pour rire ».Derrière sa machine à écrire, ce dernier enchaîne les scénarios, traduits depuis en plus de cent langues !
Le magazine recèle aussi de romans, reportages et nouvelles, autant de papiers de qualité qui permettent au journal d’acquérir une portée mondiale, aussi bien en Europe, au Japon, qu’aux Etats-Unis.
Mais en 1968, le journal ouvre ses pages à l'actualité et les grands noms quittent peu à peu le navire pour rejoindre « Charlie Hebdo » ou créer de nouveaux journaux, tels que « L'écho des savanes »s ou « Métal Hurlant ».
Life : le monde sur un plateau
Magazine emblématique, « Life » fait rêver dans les années 1950 des centaines de millions de lecteurs, américains mais pas seulement.
Le titre américain est le symbole du règne de l’image, qui émerge dans les années 1930. Mis en vente à partir du 23 novembre 1936, le tirage dépasse en quelques mois le million d’exemplaires.
Les yeux braqués sur le monde, en temps de guerre comme en temps de paix, les pages de « Life » sont marqué par les destins hors norme et les grands voyages, d’Asie à l’Afrique.
Sa physionomie révolutionne la presse traditionnelle : désormais la photographie prime sur le texte.
Les lecteurs découvrent dans les premières pages l’actualité de la semaine, par des photographies uniques. De la photo de l’assassinat de J.F. Kennedy à celle du massacre de Song My, le magazine débourse des milliers de dollars pou se procurer les images les plus courues.
Les rubriques se suivent mais ne se ressemblent pas, allant de la science, à l’histoire, en passant par l’art. « Life » ose, jusqu’à déranger comme lors d’un reportage sur l’enfantement, où les photos prises reviennent sur la fécondation jusqu’à la naissance du bébé. Le reportage est même jugé pornographique aux Etats-Unis et interdit dans de nombreux Etats.
L’apogée du magazine redescend vite, et le journal est souvent accusé de partialité, par ses prises de positions sur l’entrée en guerre en 1941 et à l’offensive américaine au Vietnam. Reste que c’est dans ce « humor and general interest magazine » que les plus grands photoreporters ont illustré plus de soixante ans d’actualité.
Quand la photo s’impose…
L’hebdomadaire d’information est lancé en 1949 par Jean Prouvost. Fort d’une expérience acquise avant-guerre avec « Paris-Soir » en 1930, mais aussi « Marie-Claire », cet industriel lance "Paris-Match" le 25 mars 1949.
Sur les fondements de « Match » et avec pour principale inspiration la revue américaine "Life", l’hebdo repose sur le photojournalisme. Alliant actualité française et internationale, c’est le premier ministre britannique Winston Churchill qui fait la couverture du premier numéro.
Le magazine révolutionne la presse traditionnelle par son engagement sur le terrain. Les lecteurs sont en prise directe avec l’actualité, de la guerre Indochine à la crise de Suez en passant par les insurrections hongroises en 1956 contre le communisme stalinien.
Les photographies sont parfois touchantes, comme celles la mort d’Edith Piaf ou Marilyn Monroe, et souvent poignantes avec les reportages de terrain notamment lors de la guerre du Vietnam.
Véritable fenêtre ouverte sur le monde, l’hebdo réutilise les recettes à succès des années 1930 avec une omniprésence de la photographie, et un appel aux techniques les plus pointues. Sa grande lisibilité permet à « Paris Match » d’arriver à son apogée en 1965 avec une diffusion supérieure à 1,5 millions d’exemplaires !
Des photographies inédites offrent une vision peu commune de l’actualité, comme en 1964, où la rédaction affrète une caravelle pour couvrir le voyage de Paul VI en Terre sainte
Par la suite, "Paris Match", tout comme « Life » dont il s’inspire, se lance dans l’actualité people.
Se multiplient les sujets sur le show-business ainsi que sur le personnel politique et les têtes couronnées.
Cette alliance entre actualité et divertissements permet au magazine de résister à la fois à une concurrence accrue et de répondre aux aspirations d’un public de plus en plus friand de presse à scandales.
Marie-Claire ou les débuts de la revue féminine et féministe
Moins adolescent que « Mademoiselle âge tendre », "Marie-Claire" devient l’hebdo féminin par excellence. Crée en 1937 par Jean Prouvost, qui consacrait déjà quelques rubriques de son quotidien « Paris Soir » aux femmes, c’est le premier magazine féminin moderne, s’ouvrant de plus aux influences américaines.
Avec plus d’un million d’exemplaires vendus, "Marie Claire" offre en une les plus grandes vedettes féminines. Des rubriques modes, et beauté aux sujets de société, le magazine diversifie ses sujets, mais toujours sous une plume féministe.
La parution du magazine est interrompue en 1942, comme pour la plupart des titres de presse français et réapparaît en 1954, sous forme de mensuel. Malgré la multiplication d’hebdo féminin tel que « Elle » ou « Femme actuelle », "Marie-claire" reste le pionner du genre.
Les femmes modernes de « Jours de France »
Souvent à disposition dans les salles d’attente des médecins ou chez le coiffeur, cet hebdomadaire féminin français est à destination des femmes sophistiqués et modernes. Financé essentiellement par la publicité massive et dirigé par Marcel Dassault le magazine allie pages de mode, dossiers santé ou chronique mondaine.
Chaque mois, les tribunes de Marcel Dassault et les dessins humoristiques de Jacques Faizant, Coq, et Hervé animent « Jours de France ». Mais c’est surtout "Les parisiennes" de Kiraz, qui font le succès de l’hebdomadaire, par leur fausse naïveté et à la silhouette reconnaissables entre milles.
Un héritage immense
L’héritage de ces magazines est encore visible aujourd’hui. Entre débats de société et actualité people, ces magazines reprennent ces mêmes recettes, qui avaient montré leur efficacité cinquante ans plus tôt.
Près de soixante dix ans plus tard, « Marie-Claire » est toujours éditée. Par sa modernité et sa liberté de ton, le magazine a initié de nombreux titres féminins de « Femme actuelle » à « Elle ».
Pour ce qui s’agit de « Salut les copains » ou « Mademoiselle âge tendre », nombreux sont les journaux qui revisitent encore aujourd’hui le concept des « idoles ».
« Paris-Match » est quand à lui toujours au beau fixe, avec une ligne éditoriale moins actualité et plus divertissements.
Cécilia Delporte
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, la presse hexagonale assiste à la naissance d’une véritable « culture jeune ». Plus seulement adolescents, ils deviennent des collégiens puis des lycéens, et à travers disques et transistors, la génération du baby boom de l’après-guerre devient aussi une consommatrice à part entière.
Les adolescents ont déjà leurs émissions des programmes de divertissements de « Salut les Copains » et « Age tendre et tête de bois », à « Dim Dam Dom », où se succèdent actrices et chanteuses en vogue telles qu’Anna Karina ou encore Agnès Varda.
Les organes de presses se multiplient, et autant les formats que les contenus se diversifient. La presse individualise sa relation avec le lecteur, et style et contenu s’adaptent dorénavant à une cible sélectionnée.
C’est ainsi qu’émerge à partir des années 1940 de nombreuses revues spécialisées, innovant par leur physionomie et souvent leur liberté de ton.
Mademoiselle Age Tendre : « pour les filles dans le vent »
C’est en octobre 1964 que « Mademoiselle âge tendre » inonde les kiosques à journaux. Au prix de deux francs, les adolescentes se jettent sur ce magazine pour les filles, alliant « idoles » et société.
Concurrencé par « Salut les copains", « MAT » se concentre moins sur la musique que sur la vie adolescente, avec tous les mois le fameux courrier des lecteurs et un horoscope détaillé.
Sont tout de même présentent les chansons chouchous de « Mademoiselle âge tendre » !
Sous l’œil du producteur de l’émission télé éminemment yé-yé, « âge tendre et tête de bois », Albert Raisner, « Mademoiselle âge tendre » devient rapidement le pendant féminin de « Salut les copains ».
Avec en guise de sous titre « pour les filles dans le vent », le magazine propose les tendances dernier cri, et les rubriques beauté où leurs vedettes préférées les conseillent. Audacieux pour l’époque, un feuillet détachable sur la sexualité s’installe même à partir de 1970.
Les recettes des cuisines sont également présentées par des vedettes de la chanson ou du cinéma et y compris par des hommes, démarche novatrice pour l’époque.
Et signe des temps, de nombreux conseils couture, tricot ou décoration sont dévoilés pour être la parfaite femme aux foyers.
« Salut les copains » dans les kiosques
C’est en 1962, année Johnny, que « Salut les copains » intègre les kiosques.
"Salut les copains", c’est dans les années 1960 une émission de télévision et radiophonique avec près de 1 600 000 auditeurs, chaque jour branché sur Europe 1.
Un succès qui se prolonge avec la version papier lancé en juin 1962. En une, « l’idole des jeunes » Johnny Hallyday et le débat passionné « Pour ou contre Vince Taylor ?’.
Les cent milles exemplaires du premier tirage s’épuisent en quelques jours et plus d’un million d’exemplaires sont vendus à la fin du mois.
Aux commandes de cette version papier, toujours Daniel Filipacchi et Franck Ténot, et à la rédaction, Eric Vincent, Guy Abitan ou encore Michel Taittinger.
Plus yé-yé que rock, "SLC" offre une formule où la couleur règne. Rouge, bleu, vert, les Une de « Salut les copains » attirent l’œil.
A l'instar de la radio, le magazine met à l'honneur la variété française et plus rarement anglo-saxonne avec les Beatles ou les Rolling Stones.
Les « idoles » sont suivies chez elle, et racontent anecdotes et confidences sur leurs vies privées. En 1963, le couple phare des yéyés, Johnny Hallyday et Sylvie Vartan pose sur la plage. “Notre meilleure joie, c'est de passer tous les deux au même programme”, confie Johnny à l'intérieur.
Certaines rubriques deviennent incontournables, et notamment celle du courrier des lecteurs, où chacun peut demander un conseil à l’oncle Dan, qui n’est autre que Daniel Filipachi.
Entre chaque numéro, les adolescentes hypothèsent sur qui fera la couverture du prochain magazine, et attendent impatiemment le poster géant de l’artiste en Une à l’intérieur.
Car "Salut les copains" a également ses têtes et ses idoles phares, notamment Sylvie Vartan, un temps compagne de Fillipacchi ou Françoise Hardy, devenue celle de Jean-Marie Périer.
« Nous les garçons et les filles »… et la politique
D’autres magazines se veulent plus politique, avec en tête de liste « Nous les garçons et les filles »..
Reprenant la physionomie de "Salut les copains", le magazine qui paraît à partir de 1963, est en fait rattaché au « Mouvement de la jeunesse communiste » qui souhaite renouveler son image.
Avec en couverture du premier numéro Jean Paul Belmondo, c’est un succès pour le PCF puisque près de 100 000 exemplaires sont vendus tous les mois.
Les adolescents y trouvent ainsi les idoles de l’époque, les dernières tendances, et des conseils beauté.
Un véritable reflet de cette « culture jeune » mais le tout orchestré par le directeur de la rédaction, Paul Merciera, toujours homme d’appareil.
"Nous les garçons et les filles" tranche également avec les autres magazines de jeunesse par son vocabulaire.
Le 22 juin 1963 alors le Tour de France se conclut par des vitres brisées, le magazine titre « Le traquenard de la nation », accusant les organisateurs d’avoir provoqué les incidents par leurs incompétences.
Pilote, aux commandes de la BD
Chaque jeudi, Pilote fait la transition entre la bande dessinée des cours de récré et celle plus adulte des années 1970.
Avec pour slogan : « Mâtin, quel journal ! », le journal accueille au milieu des années 1960 les plus grands artistes de Fred et son Philémon, à Cabu et son Grand Duduche, à côté des classiques que sont Uderzo, le créateur d’Astérix, et Morris, créateur de Lucky Luke.
Cet hebdomadaire français de bande dessinée est fondé en 1959 par les dessinateurs René Goscinny, Albert Uderzo et Jean-Michel Charlier. Édité par Dargaud, la bande dessinée ne se destine dorénavant plus à un public adolescent mais popularise le genre auprès d’une plus large audience.
Pour René Goscinny, Pilote « ne s’adresse pas seulement aux enfants, ni même aux adolescents mais aussi aux adultes. Après tout il n’y a pas d’âge pour rire ».Derrière sa machine à écrire, ce dernier enchaîne les scénarios, traduits depuis en plus de cent langues !
Le magazine recèle aussi de romans, reportages et nouvelles, autant de papiers de qualité qui permettent au journal d’acquérir une portée mondiale, aussi bien en Europe, au Japon, qu’aux Etats-Unis.
Mais en 1968, le journal ouvre ses pages à l'actualité et les grands noms quittent peu à peu le navire pour rejoindre « Charlie Hebdo » ou créer de nouveaux journaux, tels que « L'écho des savanes »s ou « Métal Hurlant ».
Life : le monde sur un plateau
Magazine emblématique, « Life » fait rêver dans les années 1950 des centaines de millions de lecteurs, américains mais pas seulement.
Le titre américain est le symbole du règne de l’image, qui émerge dans les années 1930. Mis en vente à partir du 23 novembre 1936, le tirage dépasse en quelques mois le million d’exemplaires.
Les yeux braqués sur le monde, en temps de guerre comme en temps de paix, les pages de « Life » sont marqué par les destins hors norme et les grands voyages, d’Asie à l’Afrique.
Sa physionomie révolutionne la presse traditionnelle : désormais la photographie prime sur le texte.
Les lecteurs découvrent dans les premières pages l’actualité de la semaine, par des photographies uniques. De la photo de l’assassinat de J.F. Kennedy à celle du massacre de Song My, le magazine débourse des milliers de dollars pou se procurer les images les plus courues.
Les rubriques se suivent mais ne se ressemblent pas, allant de la science, à l’histoire, en passant par l’art. « Life » ose, jusqu’à déranger comme lors d’un reportage sur l’enfantement, où les photos prises reviennent sur la fécondation jusqu’à la naissance du bébé. Le reportage est même jugé pornographique aux Etats-Unis et interdit dans de nombreux Etats.
L’apogée du magazine redescend vite, et le journal est souvent accusé de partialité, par ses prises de positions sur l’entrée en guerre en 1941 et à l’offensive américaine au Vietnam. Reste que c’est dans ce « humor and general interest magazine » que les plus grands photoreporters ont illustré plus de soixante ans d’actualité.
Quand la photo s’impose…
L’hebdomadaire d’information est lancé en 1949 par Jean Prouvost. Fort d’une expérience acquise avant-guerre avec « Paris-Soir » en 1930, mais aussi « Marie-Claire », cet industriel lance "Paris-Match" le 25 mars 1949.
Sur les fondements de « Match » et avec pour principale inspiration la revue américaine "Life", l’hebdo repose sur le photojournalisme. Alliant actualité française et internationale, c’est le premier ministre britannique Winston Churchill qui fait la couverture du premier numéro.
Le magazine révolutionne la presse traditionnelle par son engagement sur le terrain. Les lecteurs sont en prise directe avec l’actualité, de la guerre Indochine à la crise de Suez en passant par les insurrections hongroises en 1956 contre le communisme stalinien.
Les photographies sont parfois touchantes, comme celles la mort d’Edith Piaf ou Marilyn Monroe, et souvent poignantes avec les reportages de terrain notamment lors de la guerre du Vietnam.
Véritable fenêtre ouverte sur le monde, l’hebdo réutilise les recettes à succès des années 1930 avec une omniprésence de la photographie, et un appel aux techniques les plus pointues. Sa grande lisibilité permet à « Paris Match » d’arriver à son apogée en 1965 avec une diffusion supérieure à 1,5 millions d’exemplaires !
Des photographies inédites offrent une vision peu commune de l’actualité, comme en 1964, où la rédaction affrète une caravelle pour couvrir le voyage de Paul VI en Terre sainte
Par la suite, "Paris Match", tout comme « Life » dont il s’inspire, se lance dans l’actualité people.
Se multiplient les sujets sur le show-business ainsi que sur le personnel politique et les têtes couronnées.
Cette alliance entre actualité et divertissements permet au magazine de résister à la fois à une concurrence accrue et de répondre aux aspirations d’un public de plus en plus friand de presse à scandales.
Marie-Claire ou les débuts de la revue féminine et féministe
Moins adolescent que « Mademoiselle âge tendre », "Marie-Claire" devient l’hebdo féminin par excellence. Crée en 1937 par Jean Prouvost, qui consacrait déjà quelques rubriques de son quotidien « Paris Soir » aux femmes, c’est le premier magazine féminin moderne, s’ouvrant de plus aux influences américaines.
Avec plus d’un million d’exemplaires vendus, "Marie Claire" offre en une les plus grandes vedettes féminines. Des rubriques modes, et beauté aux sujets de société, le magazine diversifie ses sujets, mais toujours sous une plume féministe.
La parution du magazine est interrompue en 1942, comme pour la plupart des titres de presse français et réapparaît en 1954, sous forme de mensuel. Malgré la multiplication d’hebdo féminin tel que « Elle » ou « Femme actuelle », "Marie-claire" reste le pionner du genre.
Les femmes modernes de « Jours de France »
Souvent à disposition dans les salles d’attente des médecins ou chez le coiffeur, cet hebdomadaire féminin français est à destination des femmes sophistiqués et modernes. Financé essentiellement par la publicité massive et dirigé par Marcel Dassault le magazine allie pages de mode, dossiers santé ou chronique mondaine.
Chaque mois, les tribunes de Marcel Dassault et les dessins humoristiques de Jacques Faizant, Coq, et Hervé animent « Jours de France ». Mais c’est surtout "Les parisiennes" de Kiraz, qui font le succès de l’hebdomadaire, par leur fausse naïveté et à la silhouette reconnaissables entre milles.
Un héritage immense
L’héritage de ces magazines est encore visible aujourd’hui. Entre débats de société et actualité people, ces magazines reprennent ces mêmes recettes, qui avaient montré leur efficacité cinquante ans plus tôt.
Près de soixante dix ans plus tard, « Marie-Claire » est toujours éditée. Par sa modernité et sa liberté de ton, le magazine a initié de nombreux titres féminins de « Femme actuelle » à « Elle ».
Pour ce qui s’agit de « Salut les copains » ou « Mademoiselle âge tendre », nombreux sont les journaux qui revisitent encore aujourd’hui le concept des « idoles ».
« Paris-Match » est quand à lui toujours au beau fixe, avec une ligne éditoriale moins actualité et plus divertissements.
Cécilia Delporte