Gainsbourg : la décadance
Dieu n'est plus simplement un fumeur de havanes. L'homme à la tête de choux met le feu aux poudres en brûlant un billet de 500 francs... Nous sommes en 1984 dans l'émission télévisée d'Anne Sinclair, "7 sur 7".
Mais il y a surtout cet héritage musical. En 1975 d'abord, il y a l'album "Rock around the bunker". Serge Gainsbourg y évoque à sa façon, personnelle évidemment, la période nazie. Résultats, les titres "Nazi rock" ou "SS in Uruguay" sont boycottés par nombre de radios.
L'histoire retiendra par ailleurs cette " Marseillaise reggae ", jugée insultante par les associations patriotiques. Les anciens paras d'Indochine et d'Algérie, outragés, viendront d'ailleurs perturber un des ses concerts donnés à Strasbourg l'année suivante. A l'inverse, les organisations gauchistes à vocation antimilitariste applaudissent à tout rompre.
Dutronc : qui s'y frotte s'y pique
Le dandy ne fait pas non plus l'unanimité... pour preuve.
Son premier grand succès en 1966 avec " Et moi, et moi, et moi ". Un titre dans lequel il dénonce la politique au moins nataliste et les dérives des sociétés modernes.
En 1967, " Les cactus " deviennent une affaire d'état. Georges Pompidou déclare lors d'un débat à l'Assemblée Nationale " Comme le dit Jacques Dutronc : il y a un cactus ".
Il s'en prend également aux interdits qui brident la société avec sa chanson " Fais pas ci fais pas ça "... Nous sommes en 1968, les étudiants (se) battent le pavé.
Du côté de l'église ça cloche aussi... En 1969, Jacques Dutronc est sur la scène de " La tête de l'art " où il se produit en tenue de curé. Un vent de contestation insufflé par le non moins ironique, Claude Lanzmann, devenu son parolier.
Sardou : A la volonté du peuple
Démagogue et réactionnaire pour les uns, défenseur de la pensée populaire pour les autres, Michel Sardou se moque, lui aussi, des étiquettes.
L'artiste apparaît également avant-gardiste. Dès 1972, il n'hésite à braver les non dits en évoquant l'homosexualité et la masturbation dans " Le surveillant général ".
En 1973, il fustige les us et coutumes du catholicisme en évoquant le mariage des prêtres dans " Le curé ".
Autre titre qui provoque un scandale, en particulier auprès des féministes. " Les villes de solitude ", en 1973 toujours. Le texte de Pierre Delanöe, parolier fidèle de l'artiste, met en exergue les vices de la vertu. Le duo est immédiatement taxé de misogynie.
" Le France ", en 1975, met l'accent sur le déclin du prestige français. Le titre ne manque pas d'interloquer les conservateurs, un comble pour un artiste souvent taxé de poujadiste.
" Le temps des colonies ", l'année suivante, s'en prend à la politique de colonisation.
Enfin, " Je suis pour ", toujours en 1976, qui prône la peine de mort, du moins pour les assassins de mineurs, entraîne de nombreuses manifestations. Certains de ses concerts doivent aussi être annulés. Nous sommes alors en plein procès de Patrick Henry, jugé pour le meurtre d'un enfant.
Renaud : camarade bourgeois
Influencé par George Brassens mais également Bob Dylan, le chanteur énervant et énervé, a fait du rock un vecteur de contestation. En guise d'instrument sa plume, encrée dans le cynisme, l'ironie et l'humour.
Dans les années 70, il dénonce déjà les dérives de la société.
Avec " Amoureux de Paname " en 1975, il devient le porte parole de la jeunesse parisienne mais également banlieusarde. Des jeunes qui ne se retrouvent pas dans les attentes de leurs aînés, "Société tu m'auras pas".
Ses critiques vont également Outre Manche, avec le titre " Miss Maggie" en 1985 qui épingle Margaret Thatcher, alors premier ministre anglais.
Au l'aube des années 90, la révolte laisse place à l'amertume, "Morts les enfants" ou "P'tite conne".
En 2006, Renaud revient, fidèle à lui-même, avec l'album "Rouge Sang" qui provoque une mini polémique avec la chanson "Elle est facho". Le texte, portrait d'une électrice d'un parti d'extrême droite fait l'amalgame avec un candidat de droite.
Des contestataires et des hommes... politiques... Une équation qui fait le jeu de l'amour et du hasard... Un marivaudage qui vaut bien une démocratie.