L'album "Entre gris clair et gris foncé"
C’est en 1981 que Jean-Jacques Goldman connaît son premier succès en tant que chanteur solo, avec la chanson devenue culte depuis, "Il suffira d’un signe", un titre qui se vendra à plus de 500 000 exemplaires en France au cours de l’année. Après des débuts dans le groupe Taï Phong, à son retour du service militaire, et une participation en tant que guitariste à trois albums, le groupe se dissout. Jean-Jacques Goldman souhaite alors se lancer seul dans une aventure artistique en tant que compositeur et auteur. Mais après avoir frappé à la porte de nombreuses maisons de disques en vain, il décide – et bien lui en a pris – d’interpréter ses propres textes. Six années plus tard et après de nombreux succès accumulés, Jean-Jacques Goldman sort son cinquième album studio, un double album même, intitulé "Entre gris clair et gris foncé". Sur cet album figurent neuf chansons inédites et des reprises. Parmi ces nouveaux titres, une chanson deviendra un titre phare du répertoire de Jean-Jacques Goldman : "Puisque tu pars". L’album est plébiscité par le public et se classe en tête du Top albums en France, place qu’il conserve pendant dix-huit semaines d’affilée. Cette performance vaudra à Jean-Jacques Goldman un disque de platine en 1987, et un disque de diamant en 1988, qui récompense le million d’albums vendus.
Le succès de "Puisque tu pars"
La chanson "Puisque tu pars" figure sur l’album "Entre gris clair et gris foncé" sorti en novembre 1987. Pour cette chanson écrite, composée et interprétée par Jean-Jacques Goldman, il existe en réalité deux versions : une version longue pour l’album (sept minutes) et une version courte sortie six mois plus tard pour les médias (cinq minutes). La version courte passe en boucle au cours de l’été 1988 sur les ondes radiophoniques. Ce single, sorti en France mais aussi en Asie (Japon) et au Canada, entre rapidement au Top 50 français où il se hisse à la troisième place lors de l’été 1988, juste derrière le groupe Début de soirée avec "Nuit de folie" et le duo Glenn Medeiros et Elsa interprétant "C’est un roman d’amitié". Jean-Jacques Goldman tient là un des tubes de l’été. Cette performance commerciale lui permet de remporter un disque d’argent couronnant les plus de 450 000 disques vendus.
Des interprétations diverses de "Puisque tu pars"
Le texte écrit par Jean-Jacques Goldman pour "Puisque tu pars" donne lieu à diverses interprétations. Chacun croit y déceler un sens particulier, et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces interprétations sont divergentes.
Pour certains, ce texte qui raconte un départ concerne forcément la fin d’un amour. Autrement dit, pour eux, la chanson de Jean-Jacques Goldman évoque une rupture amoureuse, l’acceptation douloureuse, pour celui qui est quitté, de laisser l’autre s’envoler vers d’autres cieux, vers un autre amour. Car l’amour ne doit pas être possessif, dit le message de cette chanson. L’autre ne nous appartient pas et doit se sentir libre. Mais ont-ils raison de penser que cette chanson évoque une rupture amoureuse ?
Si cette interprétation a de nombreux adeptes, d’autres personnes, tout aussi nombreuses, optent pour une autre signification : Jean-Jacques Goldman exprimerait la perte tragique de son frère aîné Pierre dans "Puisque tu pars". Le chanteur a en effet un grand frère, Pierre, très engagé en politique, militant d’extrême gauche et auteur de plusieurs braquages pour lesquels il a purgé des peines de prison. C’est à sa sortie de prison qu’il est abattu en 1979. Un assassinat revendiqué par un mystérieux groupe d’extrême droite qui se fait appeler "Honneur de la police". Certains voient donc dans cette chanson une évocation de cette terrible disparition : ont-ils tort ou raison ?
Pour d’autres personnes, enfin, cette chanson évoque plutôt le départ de l’enfant du foyer. Quand l’enfant atteint l’âge adulte et peut voler de ses propres ailes, il faut en effet que les parents sachent le laisser vivre ses propres expériences. Une interprétation en effet plausible au regard du texte de la chanson. Mais est-ce pour autant la bonne ? Chacun y va de son argument. Seul Jean-Jacques Goldman lui-même a la réponse. Ce mystère mettra vingt-quatre ans à être éclairci par l’auteur lui-même.
La vérité sur le texte de la chanson
Pas simple de connaître les états d’âme et les intentions cachées dans ses chansons de ce chanteur discret et réservé qu'est Jean-Jacques Goldman. Plusieurs années passeront donc entre la sortie de la chanson et la découverte de son véritable sens.
Le mystère sur le sens de "Puisque tu pars" demeure donc entier, jusqu’à ce qu’un documentaire soit consacré au chanteur populaire. En effet, France 3 a lancé en octobre 2011 une série documentaire intitulée "Discographie", et comprenant un épisode consacré à Jean-Jacques Goldman. Le principe de cette émission est de décrypter les plus grands succès d’un chanteur en interrogeant ses proches, aussi bien artistiques que familiaux. C’est ainsi que Céline Dion, pour laquelle il a écrit un album, Johnny Hallyday, Patricia Kaas ou Maxime Le Forestier se sont prêtés à l’exercice pour leur ami Jean-Jacques Goldman. Ce dernier lui-même apparaît dans des extraits d’interviews qu’il a accordées tout au long de sa carrière. Au fil des confidences, le téléspectateur apprend ainsi l’intention réelle de l’auteur quand il a écrit "Puisque tu pars", et elle est bien éloignée des hypothèses avancées jusqu’alors.
En effet, cette chanson est en réalité un message adressé par Jean-Jacques Goldman à son public qu’il quitte à chaque fin de concert. Des séparations difficiles pour certains fans, d’où l’idée de leur dire à travers une chanson que les séparations ne sont pas forcément le signe de quelque chose de douloureux, de triste ou de négatif. C’est l’idée et l’envie aussi de le leur dire avec ses mots et non avec la rengaine bien connue "Ce n’est qu’un au revoir mes frères", que Jean-Jacques Goldman trouve particulièrement moche. Le mystère est donc éclairci : "Puisque tu pars" n’a rien à voir avec une rupture amoureuse, ni avec la mort prématurée de son frère. La chanson se révèle être un hymne au public.
L’héritage
La chanson de Jean-Jacques Goldman, "Puisque tu pars", initialement sortie en 1987, figure par la suite sur d’autres albums du chanteur et a fait l’objet de nombreuses reprises. On la retrouve en effet sur "L’intégrale 81/91" ou encore sur la compilation "Singulier 81/89", mais aussi sur des enregistrements en live comme "Traces", "Du New Morning au Zénith" ou encore "Un tour ensemble". D’autres chanteurs ont également interprété "Puisque tu pars", au nombre desquels Jean-Félix Lalanne, Céline Dion dans une version anglaise intitulée "Let's Talk About Love", Bryan Adams, mais aussi Vianney plus récemment, pour ne citer que ces exemples. Si ces dernières années, Jean-Jacques Goldman a mis un terme à son aventure avec les Enfoirés et s’est retiré de la scène, il continue à écrire des chansons à succès pour les autres. Et ses pairs ont été nombreux à avoir voulu lui rendre hommage dans un album intitulé "Génération Goldman". Ont notamment participé à cet album Zaz, Corneille, Christophe Willem, Tal, M. Pokora et nombre d’autres chanteurs de la jeune génération. Si Jean-Jacques Goldman, toujours aussi discret, n’a pas prévu de nouvel album ni de nouvelle scène, il demeure très présent dans l’esprit des Français. La preuve : il a été nommé neuf fois personnalité préférée des Français au cours des quinze dernières années.